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 RÉSILIENTE OU DURABLE ?  // Édition 1 - décembre 2020

DEUX MOIS…

Deux mois.
Nous aimerions bien ne pas avoir à commémorer cette date où nous avons basculé dans l’inconnu et l’incertitude.

Deux mois.
Et nous y sommes encore et nous y serons encore pour longtemps.
Et certains y seront pour toujours.

Deux mois.
Pour apprendre à y survivre….
À condition de nous retrouver, nous, et tous ceux qui nous ont aidés et qui nous aident encore…. Ensemble. Et nous devons songer à réparer ce qui a été cassé, à ne plus avoir peur de cette plaie béante qui traverse maintenant notre vallée. Et notre mémoire.

Deux mois.
Le temps de se convaincre que tout sera reconstruit « mieux qu’avant ». Alors que pour nous, qui avons vécu depuis cinquante ans le déclin de notre vallée oubliée, ce cataclysme était sans aucun doute le coup de grâce.

Deux mois.
Pour changer de perspective. Alors que nous pensions que c’était une cause perdue, nous n’avions pas bien vu qu’avant le désastre, les ferments de la reprise étaient déjà là, et qu’ils seront un point d’appui solide pour redémarrer.

Deux mois.
Enfin, pour apprendre…. D’abord à reconnaître les dizaines d’acteurs engagés dans le processus de reconstruction…. pour constater ensuite leurs propres difficultés à apporter des réponses claires à nos interrogations légitimes. Comme si nous répondre était une perte de temps.

Deux mois.
Pour comprendre qu’à l’évidence, rien ne serait reconstruit à l’identique. Que ceux qui pourraient payer ne le feront pas sans contrepartie, ni poser des conditions… Notre petite communauté valléenne aura-t-elle encore la force de faire aussi des propositions ? Pour le vivre au quotidien, nous sommes la mémoire de ce territoire et nous en saisissons toute la complexité. Il est de notre devoir de nous manifester pour que les erreurs du passé ne soient pas éternellement reproduites.

Où en est Remontons la Roya ?


Après un bon mois de gestation, Remontons la Roya est née à Libre le 14 novembre 2020. Son Conseil d’administration se compose de 26 personnes aux profils très diversifiés. Les statuts ont été acceptés par la Préfecture. Il reste à attendre la publication au Journal Officiel pour pouvoir ouvrir un compte et lancer une campagne d’adhésions.

En attendant, des représentants de RLR et d’autres associations de la vallée se  rencontreront en simultané à Saint Dalmas et à Breil, le samedi 5 décembre. Il s’agit de créer un Collectif et une plate forme commune.

RLR essaie de suivre de près les décisions qui concernent la reconstruction et l’avenir de la Roya et tiendra au courant ceux qui s’intéressent à l’avancée des dossiers par le biais de cette lettre d’information et des réseaux sociaux.

Dans la prochaine édition, nous parlerons des divers acteurs qui interviennent dans la reconstruction. L’un des but de RLR est que les habitants, permanents ou temporaires fassent aussi partie des acteurs.


 

DEUX MOTS CLÉS :
« RÉSILIENTE ET DURABLE »

Lors de sa visite à Tende et à Breil, Emmanuel Macron a déjà fixé un cap dans une courte phrase parfois passée inaperçue, mais pleine de sens : il va falloir reconstruire très vite » mais « de manière résiliente et durable, en limitant l’artificialisation des sols, en préservant les espaces naturels pour prévenir les catastrophes» .

De manière « résiliente »…
On connaît le sens de l’adjectif « résilient » quand on l’applique aux individus : quelqu’un qui se relève après une épreuve. Mais quand on l’applique à un territoire, il s’agit d’une notion utilisée en urbanisme, considérée innovante, après la répétition des catastrophes naturelles. Le terme vient de l’écologie (n’oublions pas que c’est d’abord une science) et désigne « la capacité d’un système à retrouver son équilibre après une catastrophe ».

Rien de neuf…
Certainement plein de bonnes intentions, Monsieur Macron ne nous apprend cependant rien de neuf. Nous sommes des experts de la résilience, et depuis bien longtemps. La résilience est même à la base de l’identité de notre territoire.
Sinon comment aurait-il fait pour résister aussi longtemps dans un environnement aussi hostile que magnifique. Séismes, avalanches, éboulements, incendies, inondations, sécheresses, tempêtes, guerres, épidémies, se sont ici enchaînés depuis des siècles. Nos villages, hameaux et aménagements ruraux ont été conçus au fil des générations pour anticiper et limiter les violences épisodiques de la nature ou de l’homme. Nous le savons tous, et nous sommes les dépositaires de cette mémoire « résiliente ».

Pont du coq - La brigue

Le Pont du Coq résilient ou pas ?
Les anciens avaient même prévu des évènements hors normes en construisant par exemple des pare avalanches « inutiles » qui ont sauvé un quartier Tende de la destruction en 1986. Mais pourquoi la voûte du Pont du Coq est-elle si haute ? C’est absurde… Nous venons dramatiquement de comprendre pourquoi. Ce pont n’a de romain ou de médiéval que le nom puisque la Levenza l’a détruit plusieurs fois. Il a été reconstruit inlassablement un peu plus haut, la dernière fois en 1710, à 14 mètres ! Si ça ce n’est pas de la résilience !

Concrètement qu’est ce que veut dire…..
Construire de manière résiliente est donc présenté comme une innovation. L’innovation dans la construction et l’aménagement permettent de réduire les conséquences des catastrophes. Dans notre économie libérale, un tel projet est rentable puisqu’il permet de réduire les coûts, limite les pertes d’exploitation et les arrêts d’activités. Sa mise en place demande au préalable de réfléchir au choix des matériaux et de modes de construction, ainsi que celui des infrastructures et services à ne pas mettre en zone exposée aux risques majeurs.
Bref…. Choix des matériaux, du site… il semble bien qu’en terme d’innovation, il suffirait d’étudier avec précision ce que les anciens avaient choisi. Bien sûr, ils ont aussi commis des erreurs. Mais les exemples ne manquent pas pour montrer leur « expertise ».

Durable ?
Le second mot clé utilisé par M. Macron peut sembler clair. Durable, c’est ce qui dure dans le temps. Mais de plus en plus souvent après « résilient », ce second adjectif s’est enrichi d’un sens plus complexe. En urbanisme et architecture (puisqu’il s’agit de reconstruction),  est « durable » ce qui respecte un certain nombre de critères : l’intégration au territoire, la maîtrise des besoins en énergie, le choix des matériaux, la maîtrise de l’eau et des déchets…La conception d’un urbanisme ou d’une architecture durables diffère beaucoup selon le relief, le climat, les ressources et, la culture locale, le niveau social des citoyens et les choix politiques. . Par exemple, l'étude des constructions traditionnelles prouve la multitude des solutions permettant d'apporter aux usagers le confort nécessaire, tout en respectant l'intégrité du territoire.

Retour aux ciappe, les vraies cette fois ?
Si, pour construire durable, il faut respecter l’architecture traditionnelle, on peut penser qu’on le fait déjà, mais….
Prenons l’exemple de la couverture des toits avec des ciappe (ou lauze). Les règles du CAUE nous contraignent à les utiliser quand on refait un toit dans la Haute Roya, quitte à nous verser une subvention pour compenser en partie le surcoût occasionné.

Mais l’utilisation des ardoises est faite de manière insolite. Quand ils refont un toit, les artisans de la vallée n’ont pas d’autre moyen que d’utiliser du mélèze acheté en Italie, et importé de Sibérie, la plupart du temps. Puis, l’ardoise elle-même n’est plus taillée dans la vallée. La dernière carrière à Paganin a fermé il a une vingtaine d’année. Alors on importe aussi les ardoises, souvent depuis l’Espagne, premier producteur européen. De toutes façons, les ardoises ne sont plus que décoratives, puisqu’elles recouvrent inévitablement du bac acier, fabriqué dans le nord de la France. Nos toits en ciappe ont donc toute l’apparence du « durable », mais ne le sont en aucune manière. Pour qu’ils le soient il faudra rouvrir une carrière de ciappe et revitaliser la filière bois locale. Et arrêter le bac acier ? Une idée à creuser…

Toits en ciappe enneigés

SOSPEL, BREIL ET TENDE,
« PETITES VILLES DE DEMAIN »


La passage d’Emmanuel Macron dans la vallée de la Roya a été accompagné d’une série d’annonces. L’une d’entre elle est presque passée inaperçue. Elle est pourtant importante. En effet, dans les Alpes Maritimes, trois villes ont été sélectionnées pour intégrer le dispositif « Petites villes de demain » : Sospel, Tende et Breil.

Un volet du « Plan de relance »
Cette opération est une déclinaison du vaste plan de relance, dévoilé le 3 septembre 2020 par M. Jean Castex, à l’échelle de petits territoires : « Petites villes de demain » vise à améliorer les conditions de vie des habitants des petites communes et des territoires alentour, en accompagnant les collectivités dans des trajectoires dynamiques et respectueuses de l’environnement.  Le programme a pour objectif de donner aux élus des villes et leurs intercommunalités de moins de 20 000 habitants exerçant des fonctions de centralités les moyens de concrétiser leurs projets de territoire ». 1000 binômes Communes/intercommunalités sont concernés en France pour un montant total de 3 milliards d’Euros jusqu’en 2026.

Une proposition de la « Convention citoyenne sur le climat 
L’esprit du dispositif « petites villes de demain » est issu d’une proposition de la « Convention citoyenne sur le climat », qui, cette fois, a été reprise par le gouvernement. En effet, les citoyens consultés ont constaté que le modèle actuel de développement urbain (la métropolisation), conduit à une concentration toujours plus grande des activités dans les grandes villes qui continuent à s’étaler et à grignoter les espaces ruraux. Dans notre département et à une autre échelle dans notre Région, ce phénomène est presque devenu une caricature, puisque la « conurbation » de la Côte, entre Cannes et Menton continue à absorber la population, les ressources et l’espace. Il est sorti de la Convention sur le climat que les « citoyens » en avaient assez de ce système qui dégrade leur cadre de vie, de l’augmentation du temps de transport qui en découle, des hypermarchés dans les périphéries, de la construction incessante de parkings, de routes et ronds points, et enfin de profondes inégalités..

Identifier et valoriser les atouts des « petites villes ».
D’après le Premier Ministre, les petites villes (moins de 20 000 habitants), disposeraient de nombreux atouts, que les Français ont pu redécouvrir pendant la « crise sanitaire » , « la qualité de vie, la souplesse d’organisation, la capacité à fédérer les acteurs locaux ou encore la proximité avec la nature ». Ces dernières années, beaucoup de petites villes se heurtent à d’importantes difficultés qui contribuent à la dégradation des conditions de vie des habitants : le départ des services publics, la précarité des transports, la disparition des commerces et l’emprise toujours plus forte du résidentiel sur l’espace agricole.

Affiche petites villes de demain









 
On dirait du « fait sur mesure » pour la Roya-Bévéra.
Ce constat serait à nuancer pour Tende et Breil : ce n’est pas tout les commerces qui sont  touchés, puisqu’on en trouve même de nouveaux… et qui fonctionnent plutôt bien. Pour Sospel, redynamisée par sa proximité avec la Côte, on a pu constater combien le développement était fragile,  après l’éboulement qui a isolé les habitants du quartier de Sainte Sabine, et celui de Monti, qui a provoqué la fermeture de la route vers la Côte pendant plusieurs mois.

Le cadre du programme , encore une fois, « résilience » et « durabilité »
En parcourant les  informations mises en ligne par le Ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités locales (ouf !), les mêmes éléments de langage reviennent incessamment : « résilience », « durable ». En plus de ces deux grandes directions, le programme « Petites villes de demain » repose sur cinq autres éléments :
  • Partir des territoires et de leur projet (donc suivre le  Projet de territoire élaboré par la CARF) et non pas imposer des décisions uniformes
  • Apporter une réponse sur mesure, chaque territoire ayant sa spécificité
  • Rechercher des formes nouvelles d’intervention et d’aménagementTenir compte des projets déjà existants (portés par la Région, le Département, l’Europe…)
  • Et enfin se donner six ans pour développer le projet.
Concrètement ?
Les petites villes retenues pourront surtout profiter d’une dizaine de mesures comme par exemple le financement d’un diagnostic et de conseils en ingénierie, la prise en charge d’une partie du déficit occasionné par le coût de l’opération, la création d’une « maison France Services », des déductions fiscales pour la rénovation des logements anciens, le financement d’espaces de télétravail et ateliers partagés (appelés « Fabrique de Territoire » on pense à la gare de Saint D'almas !), la création d’un lieu culturel (Micro Folies)  financé à 80% par l’Etat, des aides financières pour restaurer le patrimoine….

La cerise sur le gâteau
Sospel Breil et Tende sont des villes frontière. Ailleurs, cette localisation est toujours avantageuse pour des tas de raisons. Mais avec le temps, ici, malgré les liens forts que avec l’Italie, elle est devenue un obstacle qui i nous isole. La Roya et la Bévéra ont été touchées par trois crises successives en peu de temps, qui ont fait réapparaître tristement la frontière : militarisée à cause de la « crise migratoire », verrouillée à cause de la « crise sanitaire »  et enfin infranchissable des deux côtés à cause de la « crise climatique ». Mine de rien, ça commence à faire beaucoup !

Mais…
Le programme petites villes de demain a un partenaire qui colle bien à notre situation : La Mission opérationnelle transfrontalière (MOT) , dont le travail est de « de mettre en place un accompagnement sur-mesure pour les communes frontalières sélectionnées : formations, webinaires, mais aussi information sur l'accès aux financements et aide au montage de projets transfrontaliers : accès aux soins, mobilité durable, prévention des risques, protection des ressources naturelles, recueil et diffusion  des « bonnes pratiques ».

Tout ceci semble très enthousiasmant pour l’avenir. L’ensemble de ce dossier est entre les mains de nos élus. On leur offre là un bel étrier pour grimper sur un cheval plein de promesses. Le propre de ce type de programme, c’est qu’il ne réussira que s’il porté par une forte volonté politique. Mais pas seulement. Les citoyens doivent aussi  consentir des efforts pour accompagner toutes ces mesures inédites. Les aides ne tomberont pas toutes seules du ciel… il faudra convaincre ceux qui les apportent qu’ils peuvent nous faire confiance pour bien les utiliser. Et ça, c’est une autre histoire...
En savoir plus

QUELQUES INFORMATIONS PRATIQUES

 Bénévolat 


illustration volontaires
Si vous voulez venir dans la Roya pour nous aider, il faut d’abord savoir exactement qui vous allez aider et ce que vous pouvez faire. Vous devez penser aussi à votre hébergement et vos repas qui ne peuvent pas toujours être assurés sur place. De toutes façons, équipez vous comme pour partir en randonnée hivernale en montagne…
Si vous venez sans savoir qui rencontrer ou aider, vous risquez de venir pour rien. Il n’ y pas d’organisation centralisée pour l’accueil et la gestion des bénévoles. Mais vous pouvez proposer (ou demander)  de l’aide sur les différents groupes Facebook d’entraide de la vallée.

 Groupes publics 

> Entraide et infos vallée de la Roya suite tempête Alex
> Pour Tende
> La Brigue Entraide Catastrophe Alex
> Les week-end solidaires


 Aide une vallée 
Il existe aussi une application  qui met en relation des sinistrés  avec toutes personnes souhaitant leur venir en (bénévoles, élus, professionnels...) et d'organiser un réseau de solidarité.

> télécharger l'application

Les sinistrés peuvent faire remonter leur appel à des bénévoles en appelant ce numéro (Breil) :
06 24 68 11 82

 

Se rendre et se déplacer dans la Roya


petit train en bois

 En train 
Depuis la catastrophe Alex, les TER vers la Roya sont gratuits. Il faut cependant prendre un ticket passe intempéries au distributeur ou en ligne
> Pass intempérie
Le train permet actuellement de se rendre jusqu’au Fontan-Saorge par la ligne Nice Cuneo. Mais pas plus loin à cause d’un passage fragilisé et en travaux.
Pour connaître les horaires des trains et les correspondances d’éventuelles navettes (qui évoluent sans arrêt donc voir l’onglet « perturbations »):
>
Horaires
On pourra aussi y trouver les horaires des navettes « zest » à partir de la gare de Breil vers la Haute-Roya

 Par la route 
Pour se rendre dans la Roya depuis la Côte il faut emprunter le col de Brouis jusqu’à Breil et la piste provisoire ouverte par le CD06 à partir de Fontan.  La circulation se fait en convoi, trois aller-retour par jour.  Vous devez impérativement avoir un véhicule équipé de pneus neige (le passage en convoi ne vous donnera pas le temps de poser des chaînes) et faire le plein avant de partir.
Vous trouverez tous les détails des conditions de circulation et les horaires des convois sur le site du CD06 mis à jour.

> Site du CD06
POUR SUIVRE EN TEMPS RÉEL L’AVANCÉE DES TRAVAUX DE RECONSTRUCTION :

> Site de la CARF
> Site du CD06

guichet unique département

LES MAISONS D’AIDE AUX SINISTRÉS

Les sinistrés sont accueillis sans rendez-vous.

Vous y retrouverez une équipe pluridisciplinaire conjuguant permanences administratives, sociales et cellules d’appui psychologique (avec personnels administratifs, travailleurs sociaux, psychologues, …) pour répondre à l’ensemble des questionnements des personnes touchées par la catastrophe et d’apporter une assistance à la mise en œuvre des procédures de réparation. Ouvertes du lundi au vendredi, de 9 heures 30 à 17 heures

Breil sur Roya
CAPD'BREIL, 7 place Brancion
Equipe intervenante : TMS MSD + PMI, Un agent du CLIC, 2 Assureurs, CUMP

Tende
Maison des Alpes-Maritimes, 103 Avenue du 16 septembre 1947
(A proximité du Musée des Merveilles)
07.88.29.52.14

Les Maisons d’aides aux sinistrés itinérantes assurent des permanences dans les mairies et les mairies annexes de La Brigue, Fontan, Saorge, Saint-Dalmas de Tende. Merci de contacter les Mairies concernées pour avoir plus d’informations sur les jours de permanence.

> guichet unique du CD06 pour l’aide aux sinistrés